On croyait il y a peu de temps encore que le bébé ne souffrait pas et ne sentait rien : aucune émotion, aucune douleur, les cris excusés par la phrase : « il se fait les poumons » et j’en passe… Maintenant ça a bien changé ?! Oui et non, avec l’hypermédicalisation de l’accouchement, il semble que le nouveau-né soit bel et bien oublié. Au contraire, lorsque nous voyons les initiatives comme celles des Hôpitaux Amis des Bébés (IHAB), il y a plein d’espoir. Mais en fait, quelles sont les réelles compétences des nouveaux-nés à la naissance ? A quoi peut-on s’attendre en tant que parents et accompagnant.es ? Je vous les explicite maintenant pour les apprécier pleinement 🙂
Bébé se construit à travers les sens et la relation
Dans le ventre déjà, bébé développe ses facultés de perception et de communication. Il est déjà en lien avec ses parents à sa manière, à travers tous ses sens qui se développent et se déploient.
Son cerveau se construit par les entrées sensorielles autrement dit le bébé reçoit plein d’informations sensorielles qu’il traite et, sur cette base-là, peu à peu son système nerveux (le cerveau et compagnie) s’organise. C’est à partir de 28 semaines de grossesse, que les cellules nerveuses communiquent en réseau. C’est en fait la répétition des expériences sensorielles (par exemple, en chantant les mêmes berceuses à bébé) qui va renforcer ces câblages et permettre ainsi une transmission plus efficace et rapide des influx nerveux. Autrement dit, quand vous interagissez de manière régulière et même routinière avec votre bébé, il se développe de mieux en mieux !
En fin de grossesse, les 5 sens de bébé sont présents, développés (la vue un peu moins mais elle lui permet assez : voir sa maman depuis le sein) et même ceux du toucher, de l’odorat et de l’ouïe sont à un très haut niveau, c’est dire combien ces 3 sens vont être importants à sa sortie du ventre. Les études nous disent aussi que lorsque l’accouchement n’est pas perturbé, les haut taux d’adrénaline que bébé sécrète pour être bien présent à la rencontre lors de sa 1ère heure de vie sont associés à la stimulation des bulbes olfactifs, ce qui signifie qu’à la naissance, le sens de l’odorat est élevé comme jamais, pour sa survie : aller au sein de sa maman dont il reconnaîtrait l’odeur parmi 1000, à vue de nez ! Et sa mère est prête à l’accueillir, le protéger et le guider, baignée qu’elle est, par les hormones de l’amour et de l’allaitement pour son tout-petit.
La continuité relationnelle et sensorielle
Après le chamboulement de sa naissance, bébé a besoin d’être rassuré et de reconnecter immédiatement à ce qu’il connaît et ce dont il a besoin pour survivre et grandir en tant qu’humain, il a besoin d’une continuité relationnelle et sensorielle qui lui permette de tisser ses premiers liens entre son expérience dans le ventre et hors du ventre mais aussi de construire l’attachement avec sa mère de manière optimale. Rappelons que, comme chez les autres mammifères, il y a une fenêtre critique pour que l’attachement se fasse facilement, le plus précocément possible est toujours le mieux. Cette continuité est assurée par ces 3 points-clés :
1. Le contact peau-à-peau : rappelons que le premier sens développé chez le nouveau-né est le toucher puisque, dans le ventre de sa mère, il est notamment constamment enveloppé de liquide amniotique mais aussi bébé partage les anticorps de sa mère (transmis à travers le placenta), il est donc très important qu’il soit colonisé par les microbes familiers de sa maman pour développer un microbiome robuste pour sa santé présente et potentiellement pour toute sa vie (son microbiome majoritairement installé à la naissance détermine l’efficacité de son système immunitaire).
2. De manière précoce et prolongée : il s’agit de rassurer et sécuriser bébé immédiatement à la sortie de l’utérus en lui proposant une longue étreinte avec sa maman qu’il connaît si profondément. De plus les études scientifiques parlent d’une durée d’au moins 50 minutes pour que le nouveau-né puisse prendre le sein spontanément par la suite.
3. Sur le corps de sa maman : il y retrouve l’odeur qu’il connaît bien (le colostrum sent comme le liquide amniotique), mais aussi tous les sons qui ont rythmé sa vie jusqu’alors (le rythme cardiaque et plus largement tous les bruits du métabolisme en action de sa maman) et bien sûr, bébé reconnaît aussi la voix de sa mère…. Et aussi celle du co-parent par le biais de la chimie dans le corps de sa maman, que bébé sentait in-utero, en réponse à la voix du partenaire.
Pssitt, lisez-bien mon 1er article sur le peau-à-peau afin que l’expérience soit réussie ! Bien évidemment, si la mère ne pouvait pas assurer ce premier contact, alors, le co-parent pourrait déjà proposer une continuité relationnelle et sensorielle en faisant lui-même ce peau-à-peau précoce et prolongé, jusqu’à ce que le contact avec la mère soit possible.
La première épopée de bébé
Dès la naissance, bébé va montrer un comportement inné et organisé qu’on retrouve chez tous les nouveaux-nés placés dans cesdites conditions optimales. Sachez qu’à tout moment, bébé peut faire une pause pour reprendre des forces.
• Après son arrivée hors du ventre et sa 1ère respiration, bébé ne bouge pas, il va juste commencer à ouvrir ses yeux pour le premier échange de regard de toute sa vie, qui signe le début de la relation d’attachement mère-bébé (applaudissements, s’il vous plaît!), c’est là que l’hormone de l’amour est à son plus haut pic comme jamais dans la vie !
• Puis, gentiment, bébé commence à bouger sa tête et ses membres. Ensuite, il s’active et agite ses mains sur le mamelon de sa mère ou les met dans sa bouche, il regarde sa maman et le mamelon si appétissant.
• Si ses pieds trouvent un appui et qu’il est en contact ventral sur sa maman, bébé commence à faire des mouvements réflexes de recherche du sein. Il peut alors se repousser naturellement par ses pieds pour s’avancer de quelques centimètres et s’approcher du mamelon, d’où l’importance d’un peau-à-peau maîtrisé pour lui permettre ce prodige !
• Enfin, bébé attrape le mamelon avec sa main, peut le lécher, et il va faire sa première tétée. Dans un peau-à-peau gagnant, déjà décrit précisément dans mon premier article, bébé est dans une position absolument idéale pour prendre le sein à pleine bouche, ce que l’on souhaite pour une succion efficace. Bien évidemment, sa mère l’aide, le guide, l’accompagne pour une prise du sein spontanée et indolore. Mais pourquoi en fait espérer cette tétée maintenant ? Cette tétée est bénéfique à la fois au bébé et à la fois à la mère. Elle permet d’engrammer la bonne succion du sein, le réflexe de succion étant alors le meilleur dans cette première heure de vie. La succion sollicite la sécrétion d’ocytocine chez la mère pour effectuer le réflexe d’éjection de lait, cette même ocytocine engendre en même temps les contractions efficaces de son utérus pour expulser le placenta rapidement.
• Fort probablement, bébé va s’endormir gentiment tout en continuant à téter dans la transition vers le sommeil.
Savourez toutes ces étapes et ces compétences innées de votre bébé qu’il pourra vous montrer s’il est placé dans une continuité sensorielle et relationnelle, sur sa maman, qui telle une petite fée apportera les petits gestes de précision pour que cette danse à deux aboutisse à la première tétée. Le co-parent a toute sa place ici, dans l’intimité familiale qui se crée. Ce tableau dépeint est essentiel pour donner les empreintes sensorielles favorables au tissage de la relation de famille qui vient de naître !
Pensez donc à vraiment remettre à plus tard tous les premiers soins de routine de votre bébé !
Profitez de ces moments inoubliables !
A très bientôt !